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Double-Jeu

Double-JeuTexte de Kelora
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Texte de Kelora

- Es-tu certaine que ce soit raisonnable ?


Son ton et son regard avaient toujours été pesants, c'était sa manière d'être, mais il y avait quelque chose dans son regard. Cette lueur de confiance et de contrôle absolu sur son être, une discipline faite d'acier pour laquelle je ne pouvais qu'éprouver de l'admiration. 


- Je ne suis pas certaine...

- Alors pourquoi venir me déranger ?, sa voix s'était faite tranchante,

- Il faut faire quelque chose ! 

- En les aidant, eux ?


Elle asséna ce eux, l'aboyant presque, nul doute que dans la bouche d'une autre personne, une vulgarité en serait sortie. 


- S'ils peuvent endiguer ceux qui veulent cette guerre, et qu'une alliance est formée, les probabilités que l'on nous traque tous sont moindres.


Je sentis et je vis son visage se détendre.


- Alors tu es sûre.


J'entrouvris la bouche, les propos du lieutenant en tête. Peut-être allais-je trahir tous les mages et les mener à leur perte ? Pouvais-je vraiment avoir confiance en eux ? Mais avant que je ne puisse l'évoquer, la professeure reprit.


- Le doute n'est pas permis en magie, tu fais ou ne fais pas. Il n'y a pas de faire un peu, puis finalement hésiter au moment clef et perdre le contrôle. Je suis lasse de devoir te le répéter lorsque tu prétends que c'est ton objectif. Entends-le une bonne fois pour toutes.


- Et si je provoque la mort ?


Un soupir excédé lui monta, elle ne me regardait plus à présent, elle était une des rares personnes en qui j'avais confiance pour me guider, j'avais besoin de son opinion, à défaut de son approbation. 


- Alors tu vivras avec cela sur la conscience, plus ou moins longtemps selon ta résistance.


Son attitude me hurlait de déguerpir, de cesser la molester avec mes idioties et mes réflexions. Je restais néanmoins assise, face à elle, les secondes s'étirèrent. Allait-elle me dire vers où ses pensées s'en étaient allées ? J'avais appris à reconnaître son air pensif, dissimulé sous le mépris qu'elle portait comme une armure. Elle ne m'avait partagé ses réflexions personnelles qu'à de très rares occasions au fil des années. Je tentai quelque chose.


- Je ne porterais pas de pire déshonneur à mon nom que ce qui est déjà.


Un rictus étira la commissure de ses lèvres, tandis qu'une lueur traversait son regard.


- C'est tout ?

- Si je ne fais rien, il y aura des morts malgré tout. J'ai la sensation que cette alliance pourrait être bénéfique à terme.


A peine eussé-je finis ma phrase, qu’un chant résonna en moi. Celui des Thaumaturges, les voix de tous mes frères, faites de mots indistincts et de cycles d'énergie. Mon souffle s'étrangla dans ma gorge. Je vis le Cœur de notre fraternité qui s'était mis à battre, pulsant l'énergie dans mes veines.


- Que fais-tu ?

L'écho de ses mots me parvint déformé, altéré, tandis que je jugulais ce qu'il se passait. Jamais encore l'arrivée d'un nouveau frère n'avait fait réagir notre Cœur à ce point. Son battement devenait plus puissant, plus profond. Il devait être à Trigorn, je savais déjà qu'elle l'était. Présente sur les lieux, face au démon, j'avais reconnu les reliquats de son énergie, était-ce par son biais que cette personne avait rejoint la fraternité ?


- Rien... C'est simplement...


Le chant des nôtres se fit plus fort, plus agité, tous l'avaient ressenti et souhaitaient un bon retour à la maison à notre nouveau frère.


- Rien.


Je repris la parole et mes esprits, je chercherais à comprendre plus tard ce qu'il venait de se produire. Une infime possibilité m'effrayait, et si la professeure le vit, elle n'en dit rien.


- Je suis prête à le faire, malgré les risques.


Je me levai, j’avais repoussé à la limite de mon esprit le pouvoir incendiant chaque nerf de ma peau, mais je ne pouvais finalement l’ignorer. Les étoiles jaillissaient derrière mes yeux, me projetant à proximité du cœur. Je pouvais sentir chaque ancre qui vibrait de pouvoir contenu tandis qu’elles se relayaient entre elles, formant notre toile, notre plus grande œuvre. La gloire de nos ancêtres, reprenant l’ascendant sur ce qui nous appartenait. Elle crépitait au bout de mes doigts, l’énergie, ne demandant qu’à être sollicitée, qu’à être employée à son œuvre. De se faire prodige à partir d’une idée.

Ma mère avait bien compris une chose, l'énergie ne se soustrait pas, elle ne s'additionne pas, elle se démultiplie pour chaque personne dans un boucle.

Ce nouvel arrivant avait changé quelque chose, et l'énergie des Thaumaturges semblait toucher un infini que je n’avais jamais pu rêver. Une part de moi jubilais de l’ardeur qui traversait nos veines. L’autre tentait de nous ramener à la raison. Si, moi, je ressentais cette ode au pouvoir, qu'en serait-il des autres ? Qu'en serait-il d'elle ? Althée était la gangrène de notre fraternité.


- Les mages qui ont utilisé la sphère de vie ont sauvé la ville, quoiqu'on en dise. Ils ont détruit l'armée du Seigneur Pignoval. 

- La plaine en porte encore les stigmates, c'était une catastrophe. C'est vous qui me l'avez enseigné. 

- Je vous enseigne l’histoire telle que vous devez la voir. Mais vous avez grandi, Livia. C’est à vous de vous forger votre propre opinion.


Je hochai la tête à son propos puis me redressais, l’influx de pouvoir n’avait rien changé, et j’utiliserai l’énergie des Thaumaturges pour créer ce qui permettrait d’en déceler les corrompus qui profanaient nos valeurs, qui transgressaient les lois élémentaires, puis je le confierai aux chasseurs de sorciers.

Brunehilde Richetour

Brunehilde Richetour

Assemblée des Mages

Livia Fossecrelle

Livia Fossecrelle

Assemblée des Mages

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